La petite étoile qui avait peur de la nuit

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Un jour… une petite étoile brille.

Ou plutôt elle ne brille pas justement parce qu’elle est en plein jour.
Elle ne peut pas lutter, ne peut pas se comparer à la lumière du soleil qui éclaire tant !

Et la petite étoile est triste parce qu’il y a bien longtemps… peut-être quelques siècles… peut-être quelques années… peut-être quelques jours… peut-être quelques minutes… ou peut-être quelques secondes…
Enfin, ça n’a pas d’importance parce que le temps n’existe pas au Pays des étoiles.
Il y a bien longtemps donc, elle a rencontré une autre étoile qui s’appelle l’Étoile du Berger. Et l’Étoile du Berger lui a expliqué que le rôle d’une étoile, c’est d’aider les gens à trouver leur chemin.

La petite étoile est triste car elle a tant à donner aux autres… et personne ne fait attention à elle.
D’ailleurs personne ne la voit ! Elle est invisible dans la lumière du jour !

Et la petite étoile est très triste car elle ne peut pas aider les gens à trouver leur chemin.…

Elle décide d’aller voir une vieille étoile pleine de sagesse et de lui expliquer pourquoi elle est si triste :
– Je ne peux aider personne à trouver son chemin ! Personne ne me voit ! Qu’est-ce que je dois faire ? Lui demande-t-elle !

La vieille étoile sage la regarde en souriant :
– Si tu veux vraiment aider les gens à trouver leur chemin, il existe peut-être une solution… Pourquoi ne pas entrer dans la pénombre, dans la nuit ?

Mais la petite étoile n’a jamais quitté le jour. Elle ne connaît pas la nuit. D’ailleurs, c’est bien la première fois qu’elle entend parler de cette nuit !
– C’est quoi la nuit ? demande-t-elle.

La vieille étoile sage lui indique une direction.
– Va par là ! lui dit-elle. Et quand tu la rencontreras, tu la reconnaîtras !
– Et je la reconnaîtrai comment ? Je ne sais même pas à quoi elle ressemble.
– Tu la reconnaîtras justement parce que tu ne la connais pas ! … Allez va !

Et la petite étoile part dans la direction que lui a indiquée la vieille étoile sage. Elle voyage pendant très longtemps… pendant des siècles… pendant des années…
Enfin !… Je ne sais pas exactement ! Souviens-toi, le temps n’existe pas au Pays des étoiles.

Enfin, au loin, elle aperçoit quelque chose. Elle se dit :
– Ce doit être ça la nuit !

Elle ne comprend pas ce qu’elle voit. Elle ne peut pas le comparer à quelque chose qu’elle connaît déjà ! ça ne ressemble à rien de ce qu’elle connaît déjà !

– Ce doit être ça, la nuit ! Se dit-elle de nouveau.
La vieille étoile sage lui a bien dit qu’elle la reconnaîtrait justement parce qu’elle ne la connaît pas !
Et la vieille étoile sage, elle sait, elle ! C’est pour ça qu’elle est sage.

La petite étoile avance prudemment. Elle est quand même méfiante. Mais la vieille étoile sage lui a dit d’entrer dans la nuit pour pouvoir aider les gens…
Elle s’approche et arrive au bord de la nuit.

C’est bizarre ! Elle ne voit rien ! Elle n’a jamais rencontré une chose pareille ! Et… elle commence à avoir peur. Parce qu’on a peur de ce qu’on ne connaît pas !
Elle se rappelle de nouveau les paroles de la vieille étoile sage. Elle veut vraiment aider les gens.

Alors, elle pénètre dans la nuit.

Elle a très peur ! Mais le souvenir de la vieille étoile sage l’aide à trouver du courage.
Si la vieille étoile sage lui a dit d’entrer dans la nuit… elle sait, elle ! C’est pour ça qu’elle est sage !
Plus elle avance, plus elle a peur… mais elle avance toujours !

Il arrive un moment où sa peur est si forte qu’elle s’enfuit le plus vite possible vers le jour !

« Tu les connais ces étoiles
qui ont peur de la nuit ?…
Bien sûr !… Les étoiles filantes ! »

Et notre petite étoile se retrouve dans le jour.

Elle n’a plus peur, bien sûr… mais de nouveau elle devient très triste… Mais pas pour la même raison.
Elle est triste car elle ne peut pas aider les gens simplement parce qu’elle a peur. Parce qu’elle a peur de quelque chose qu’elle ne connaît pas. Parce qu’elle a peur de la nuit !
Et elle devient de plus en plus triste…

Elle retourne voir la vieille étoile sage pour lui demander conseil à nouveau :

– Je ne peux pas aider les gens simplement parce que j’ai peur de la nuit ! C’est idiot !

La vieille étoile sage la regarde en souriant :

–Pour ne plus avoir peur de la nuit, il existe peut-être une solution… Quand tu as trop peur, pourquoi ne pas t’asseoir et fermer les yeux ?

La petite étoile se dit : «Mais, ce n’est pas idiot, ça !».

Et elle part dans la direction de la nuit, confiante.
Je ne sais pas depuis combien de temps elle voyage, le temps n’existe toujours pas au Pays des étoiles, mais quand elle arrive au bord de la nuit, elle est toujours confiante.
Elle n’a plus aucune raison d’avoir peur, maintenant elle connaît la nuit… du moins, elle sait à quoi elle ressemble.
Alors, elle pénètre dans la nuit.

Dire qu’elle est rassurée, c’est beaucoup dire !
Mais, elle n’a pas aussi peur que la première fois.

Quand elle arrive à l’endroit d’où elle a fui la première fois, la peur la reprend. Jusqu’ici elle connaissait. Mais maintenant, c’est de nouveau l’inconnu !…
Et elle recommence à avoir très peur.

Elle a l’idée de s’enfuir comme la première fois…
Mais elle se rappelle les paroles de la vieille étoile sage :

– Quand tu as trop peur, pourquoi ne pas t’asseoir et fermer les yeux ?

Alors, elle s’arrête là où elle se trouve, s’assoit, ferme les yeux et attend.

Personne ne sait combien de temps elle est restée comme ça… Heureusement que le temps n’existe pas au Pays des étoiles !

Au fond d’elle, très loin, une petite lueur se met à briller doucement. Oh ! Une toute petite lueur, minuscule, et très très loin.
Et cela la rend heureuse !

Plus elle est heureuse, plus la lueur grandit…
Plus la lueur grandit, plus elle est heureuse…
Elle ne comprend pas ce qui lui arrive, mais la lueur devient de plus en plus forte, grandit de plus en plus vite, et la petite étoile est de plus en plus heureuse…
Cette lueur est très vite une lumière puissante qui la rend encore plus heureuse…

Et cette lumière devient si puissante que la petite étoile doit ouvrir les yeux !

Et là !…
Elle regarde autour d’elle… devant, à droite, à gauche, derrière, au-dessus… et même en dessous…
Elle éclaire son environnement !

Elle peut aider les gens à trouver leur chemin !

Elle repense à la vieille étoile sage.

– La vieille étoile sage a raison ! Il suffit que je me mette à briller pour que la pénombre n’existe plus !

On m’a dit qu’elle brille toujours et qu’elle est de plus en plus heureuse !

Si toi aussi, parfois, tu as peur.
Ou si tu as l’impression de
ne plus pouvoir aider les autres…
Essaie ! Assieds-toi…
Ferme les yeux…
Observe au fond de toi !…
Et qui sait ?
Peut-être qu’une petite lueur, mais…
Mais ça c’est une autre histoire !…

Ça !… c’est TON HISTOIRE !

Notre seconde chance

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Il y a quelque temps,
J’ai rencontré un vieil homme
Qui m’a raconté une histoire,
Une aventure qui lui est arrivée,
Une histoire étrange…

Tout commence un matin, comme les autres, apparemment…
Ce matin là, L’Homme se réveille de bonne heure.
Comme tous les matins.
Il se lève et déjeune.
Un bol de chocolat, des céréales et un jus d’orange.
Comme tous les matins.
Il se brosse les dents, se regarde dans la glace en faisant sa toilette…
Et c’est à ce moment-là qu’il se demande :

Pourquoi ne sommes-nous pas des Dieux ?
Pourquoi l’Humain n’est-il pas l’égal des Dieux ?
Pourquoi ne sommes-nous pas dans la Communauté des Dieux ?
Pourquoi ne siégeons-nous pas à l’Assemblée des Dieux ?
Pourquoi les Humains ne sont-ils pas des Dieux ?

Il s’habille et part au travail.
Comme presque tous les matins…
Et toujours cette même question :
– Pourquoi les Humains ne sont-ils pas des Dieux ?

Devant la porte de l’immeuble, il croise Madame Michaud, sa concierge. Elle râle déjà, comme tous les matins. Cette fois, c’est après les chats ou les chiens qui ont dispersé les poubelles pendant la nuit.

– Bonjour Madame Michaud !
– Bonjour M’sieur L’Homme !
– Dites-moi Madame Michaud, à votre avis, pourquoi ne sommes-nous pas des Dieux ?
– Vous en avez de drôles de questions, ce matin ! J’sais pas moi ! Pourquoi ne pas le demander aux Dieux ?

Comme tous les matins, il s’arrête acheter son journal.
– Bonjour Monsieur L’Homme, votre quotidien habituel ?

L’Homme est songeur.
– Oui, Oui, Monsieur Martin… Dites-moi Monsieur Martin… Pourquoi les Humains ne sont-ils pas des Dieux ?
– Ah ! Ah ! Ah ! Vous êtes en forme, ce matin, M’sieur L’Homme ! Pourquoi ne pas le demander directement aux Dieux ?

Il pose la même question au boulanger, au facteur, à Jacques son collègue de travail, à Audrey sa meilleure amie… à tout le monde… à tous ceux qu’il croise.
Toujours la même question :
– Pourquoi les Humains ne sont-ils pas des Dieux ?
Et toujours la même réponse :
– Pourquoi ne pas le demander aux Dieux ?

Mais bien sûr !
Pourquoi ne pas le demander aux Dieux ?
Il décide donc de se rendre à la Communauté des Dieux, de poser la question aux Dieux !
Le soir même il démissionne, prépare son sac à dos, règle ses dernières affaires courantes… Et dès le lendemain matin, il part en direction de la Communauté des Dieux.
Il a appris qu’elle doit se trouver quelque part au pied de l’Himalaya, sur les hauts plateaux tibétains.
Il traverse des océans, des déserts, des forêts, des montagnes, voyage pendant très longtemps… et arrive enfin à la porte de la Communauté des Dieux.

Devant lui se dresse un grand portail blanc taillé dans la falaise. Une grande inscription, couleur or, est gravée en arc de cercle au dessus du portail :

« COMMUNAUTÉ DES DIEUX »

Il fait tinter la cloche.
– Diling ! Diling !

Le portier fait son apparition.
– C’est pourquoi ?
– Puis-je parler à Dieu, s’il vous plaît ?
– Lequel ? Vous savez, ils sont nombreux ici !
– Je ne sais pas, moi ! Dieu quoi ! Le Dieu des Dieux, je ne sais pas, moi… Le Big Boss, le Grand Patron ! LE DIEU !
– Ah ! Il suffit de le demander !

Et dans la seconde qui suit, Dieu se trouve devant lui.
Quand on demande Dieu, il répond tout de suite à ce qu’on dit !
– Je suis le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux. Je suis le représentant des Dieux auprès des Humains. Que puis-je faire pour vous ?

Et L’Homme lui pose LA question :
– Pourquoi les Humains ne sont-ils pas des Dieux ?

Dieu regarde L’Homme pendant quelques instants.
– C’est une bonne question ! Pourquoi ne pas la poser directement à l’Assemblée des Dieux ?

Juste le temps d’un clignement des yeux et L’Homme se retrouve à l’Assemblée des Dieux.
C’est une grande pièce très éclairée, une sorte de dôme en verre. A travers les murs transparents, L’Homme peut voir les étoiles, le cosmos. Il peut aussi voir la terre.

C’est la première fois que L’Homme voit la terre de si haut. Elle est belle vue de là-haut. Elle est ronde.
Il suffit qu’il regarde un lieu précis pour en voir tous les détails, comme s’il y était.
Il se concentre sur sa ville, sur son quartier, sur sa rue. Il aperçoit les enfants qui jouent dans sa rue. Madame Michaud qui crie après eux, comme d’habitude.

Et là, dans le dôme, les Dieux.
Des centaines de Dieux, des milliers de Dieux sont présents. Il y a des Dieux de toutes les races, de toutes les couleurs. Il en reconnaît quelques uns qu’il a vus dans des livres. Il y a même les Dieux des animaux, les Dieux des arbres, les Dieux des fleurs…
Tous les Dieux !

Le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux prend la parole :
– Vous vous demandez pourquoi les Humains ne sont pas des Dieux ? Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous désirez accéder à la Communauté des Dieux ?

L’Homme prend son courage à deux mains.
– Nous les Humains, maintenant nous savons faire autant de choses que vous, les Dieux !
Nous pouvons remplacer les vallées par des lacs immenses et créer des déserts où vous y aviez mis des lacs !
Nous savons transformer les forêts en déserts et faire pousser des forêts où il n’y avait aucun arbre avant !
Nous pouvons traverser les montagnes en les creusant. Et même les détruire si c’est nécessaire !
Nous savons aussi creuser des tunnels sous les mers.
Nous sommes capables de voler !
Nous pouvons discuter avec quelqu’un qui se trouve à des milliers de kilomètres de nous !
Nous sommes même capables de créer le jour, où vous, les Dieux vous aviez fait la nuit, grâce à l’électricité…
Et on ne fait que commencer…
Imaginez ce que nous serions capables de faire si nous étions des Dieux !

L’Assemblée des Dieux écoute.
Quand L’Homme a fini sa plaidoirie, le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux s’adresse de nouveau à lui :
– Dites-moi, L’Homme, avez-vous trouvé la Sagesse ? Vous savez, ce qui permet de faire preuve d’un jugement droit, sûr, averti. Ce qui permet à une personne de réaliser un modèle de vie idéal !
Alors L’Homme, pensez-vous avoir trouvé la Sagesse ?

L’Homme ne répond pas.
Il baisse les yeux.
Il sait que les Humains n’ont pas trouvé la Sagesse… Et, il n’ose pas l’avouer aux Dieux.

Le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux regarde L’Homme. Il reprend la parole :
– La première condition pour accéder à la Communauté des Dieux et siéger à l’Assemblée des Dieux est d’avoir trouvé la Sagesse.
Mais vous, les Humains, vous ne remplissez pas cette condition. Nous ne pouvons vous offrir la carte de membre permanent de la Communauté des Dieux.
Nous avons décidé de vous accorder une chance !
A compter de ce jour, vous, les Humains, recevrez chaque matin 86400 Talents pour vous permettre de trouver la Sagesse. Vous pourrez en faire ce que vous voulez…
Mais ATTENTION, que vous ayez utilisé ou non les Talents du jour, quoi que vous en ayez fait, le soir même ils disparaîtront. Et le lendemain matin, au réveil, vous recevrez de nouveau 86400 Talents. Et ceci tous les jours de votre vie d’Humains !
Revenez dans cinquante ans, et si vous avez trouvé la Sagesse, nous reverrons notre décision.

L’Homme quitte la Communauté des Dieux et se retrouve sur terre.
Il reprend la direction de sa ville.
Il traverse les mêmes océans, les mêmes déserts, les mêmes forêts, les mêmes montagnes…

Il est L’Homme !
Celui qui a parlé aux Dieux !
Celui qui a permis aux Humains de posséder les Talents, les 86400 Talents quotidiens !
Celui grâce à qui les Humains seront acceptés à la Communauté des Dieux !
Celui grâce à qui les Humains siégeront à l’Assemblée des Dieux !
Celui qui permettra aux Humains de devenir des Dieux !

Quand il arrive chez lui, tout le monde est déjà au courant.
L’Homme a osé !
Il est allé voir les Dieux et leur a posé LA question !

Et depuis ce jour, chaque Humain possède des milliers de Talents… et il peut en faire ce qu’il veut !

Et ça change tout de posséder des Talents !

Au début, les premiers jours, les Humains ne comprennent pas très bien ce qui leur arrive. Mais ils saisissent très vite que les Talents, c’est bien utile !
Avec du Talent, on en fait des choses !
Bien plus vite et beaucoup mieux que sans Talent !

Les premiers jours, certains Humains se mettent à compter les Talents qu’ils possèdent. Il y en a bien 86400, mais compter ses Talents, ça prend du temps. Il faut bien toute la journée pour compter tous ces Talents.

Beaucoup d’Humains utilisent leurs premiers Talents à… compter leurs Talents.
Ils utilisent une partie des Talents offerts par les Dieux à trouver des moyens pour les compter plus vite, pour les compter sans faire d’erreur.
Et le jour suivant, il faut recommencer car le nombre de Talents n’est jamais le même.
Tous les matins, ils reçoivent bien les 86400 Talents promis par les Dieux. Mais dès que la journée commence, le nombre n’est déjà plus le même. Ces Humains cherchent des moyens de compter plus vite, plus juste. Mais ils ont beau compter plus vite, plus juste, quand ils ont fini de compter tous leurs Talents, ils ne trouvent jamais le même nombre, alors… ils recommencent !

Beaucoup de Talents sont utilisés par les Humains dans la recherche, dans la médecine, dans l’industrie, dans l’aéronautique, dans… l’armement.
Certains les utilisent dans les arts, dans le sport, dans les loisirs.
La très grande majorité des Humains trouvent dans les Talents le moyen d’être LE PLUS quelque chose… D’être LE PLUS beau, d’être LE PLUS fort, d’être LE PLUS intelligent, d’être LE PLUS riche, d’être LE PLUS … LE PLUS !
D’aller toujours PLUS… toujours PLUS vite, toujours PLUS loin, toujours PLUS haut… toujours PLUS !

Partout où les Humains se servent des Talents pour évoluer, les progrès se font sentir d’une façon impressionnante. Tout ce qui peut servir un Humain à être LE PLUS ou PLUS quelque chose est une bonne raison d’utiliser des Talents… à n’importe quel prix ! Sans se soucier des conséquences pour la terre !
Très peu d’Humains choisissent de chercher la Sagesse avec les Talents que leur ont offert les Dieux. D’ailleurs, ceux-là, on n’en entend pas beaucoup parler.

La très grande majorité des Humains oublient pourquoi les Dieux leur ont offert les Talents.

Cinquante ans après sa première rencontre avec les Dieux, L’Homme, devenu le représentant des Humains auprès des Dieux, reprend la route de la Communauté des Dieux.
Cette fois-ci, L’Homme prend l’avion. Le dernier modèle construit grâce aux Talents offerts par les Dieux… LE PLUS beau, LE PLUS gros, LE PLUS rapide, LE PLUS silencieux, mais aussi… LE PLUS polluant !

L’Homme se retrouve dans le même dôme que cinquante ans plus tôt, devant l’Assemblée des Dieux.
Il voit la terre d’en haut pour la deuxième fois.
Cette fois, L’Homme en est sûr !
Les Humains vont siéger à l’Assemblée des Dieux !
Ils sont vraiment devenus les égaux des Dieux !
Peut-être même meilleurs !

Le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux s’adresse à L’Homme :
– Alors L’Homme, avez-vous trouvé la Sagesse ?

L’Homme regarde les Dieux avec fierté. Il les dévisage un par un, un petit sourire au coin des lèvres.
Il va les surprendre !
L’Homme sait que les Dieux ne vont pas en revenir !

Les Humains sont devenus PLUS forts, PLUS intelligents que les Dieux !
PLUS puissants que leurs créateurs !
Les disciples ont dépassé les Maîtres !
Ils vont être fiers d’eux !
Les Humains sont devenus des Maîtres !

Les meilleurs Maîtres ne sont-ils pas ceux qui créent LE PLUS de Maîtres ?
Oh, oui ! Que les Dieux vont être fiers de ce que sont devenus leurs disciples !

– Avez-vous trouvé la Sagesse ? Lui demande une deuxième fois le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux.

L’Homme les regarde de nouveau. Il croit reconnaître quelques Humains. Il croit même reconnaître Jésus, Bouddha et quelques autres.
Mais il n’en est pas sûr. Leurs visages dégagent tellement de Lumière.
La plus grande différence que L’Homme a trouvée entre les Dieux et les Humains, la première fois qu’il a vu les Dieux, c’est la lumière qu’ils dégagent. Pas une lumière aveuglante, mais une lumière puissante comme il n’en a jamais vue auparavant. Une lumière qu’il peut regarder sans cligner des yeux.

Il maintient le suspens.
Il les dévisage un par un.
Il jouit de cet instant.

Il regarde le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux, ferme les yeux quelques instants, prend une grande inspiration. Il dévoile un large sourire et commence :
– Je tiens tout d’abord à vous remercier de la part des Humains pour les magnifiques cadeaux que vous nous avez offerts. Grâce aux Talents, la vie des Humains s’est considérablement améliorée. Nous avons su en tirer profit.
Maintenant, nous sommes vraiment devenus vos égaux et il ne fait plus aucun doute que notre place est bien à l’Assemblée des Dieux. Nous sommes maintenant capables de faire TOUT ce que les Dieux savent faire !
Maintenant, nous sommes capables de faire aussi bien que vous, les Dieux…
Peut-être même mieux que vous…
Nous sommes capables de construire des maisons qui grimpent jusqu’au ciel.
De voler comme les oiseaux… beaucoup plus vite que les oiseaux, plus vite que le son.
De nous déplacer à plusieurs centaines de kilomètres heure.
De voyager dans l’espace.
D’aller sur d’autres planètes, on a déjà commencé par la Lune.
Nous sommes capables non seulement de nous parler à des kilomètres de distance, mais maintenant également de voir ce qui se passe de l’autre coté de la Terre en direct.
De faire rougir des tomates sans qu’elles ne voient jamais le soleil.
Faire pousser du blé dans le désert.
On arrive même à faire manger de la viande à des animaux herbivores.
Nous avons réussi à fissurer la plus petite particule, l’atome, pour faire de l’électricité…
Pardon ? Les déchets ? Pas de problème ! On les enfouit à des centaines de mètres sous terre. Il n’y a aucun danger !
On arrive même à faire des enfants sans relation sexuelle.
Bientôt, nous serons même capables de choisir le sexe de notre futur enfant et pourquoi pas, la couleur de ses yeux, la couleur de sa peau…
Choisir l’enfant qu’on désire, quoi !
Des exemples comme ça, je peux vous en donner des centaines…
Et ce n’est qu’un début, on a plein d’idées…

Le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux lui demande :
– Et avez-vous trouvé la Sagesse ?
– Pas encore, mais on a trouvé mieux que ça ! Il suffit qu’un seul Humain la trouve ! On a découvert le moyen de nous reproduire à l’infini à partir d’une simple cellule du corps. On a appelé ça le clonage.
Qu’un seul Humain devienne un sage, il nous suffit d’en faire des clones ! Ça, vous les Dieux, vous n’y avez même pas pensé !

« Ça suffit ! Assez ! »

Ce n’est pas un hurlement, pas un cri de colère mais une vibration. Une vibration puissante comme seul un Dieu est capable de le faire. Une vibration comme le bruit d’une basse sortant des enceintes pendant un concert, multiplié par… par Dieu !
Une vibration qui se prolonge, qui dure, qui dure…
C’est le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux.

L’Homme sent son corps vibrer, trembler, trembler…
Il voit la Terre vibrer en même temps que son corps. Puis il voit la terre trembler en même temps que son corps.
Mais pas un petit tremblement de Terre sur un tout petit coin de Terre…
Un vrai tremblement de Terre !

TOUTE LA TERRE TREMBLE !

Il voit les barrages se fissurer, se briser comme des châteaux de sable et des millions de litres d’eau s’abattrent sur des villes.
Il voit la mer s’agiter, se secouer de plus en plus fort, comme l’eau dans une bassine qu’on essaierait de transporter. Des vagues de plusieurs centaines de mètres de haut engloutir des villes entières.

Il voit des centrales nucléaires s’enfoncer dans le sol et imploser, des nuages de poussière et de cendres chaudes s’élever dans le ciel et retomber sur des kilomètres.
Des explosions d’une puissance qu’il n’aurait jamais pu imaginer en plein milieu des déserts… sans doute des caches d’armes secrètes.
Il voit des volcans surgir et exploser sur tous les continents, la lave anéantissant tout sur son passage.
Il voit la Terre se fissurer comme un fruit trop mûr que l’on presserait un peu trop fort entre le pouce et l’index.
Et…
Il voit la Terre exploser dans un fracas à lui faire crever les tympans.

Instinctivement, il s’accroupit, se recroqueville, ferme les yeux. Se protége la tête pour ne pas recevoir les débris de Terre…

Et c’est le silence !
Mais un vrai silence !
Un silence plus silencieux
que le silence d’un flocon de neige
se posant sur une feuille…
Un silence angoissant !

Plus jamais, il n’entendra les chants des oiseaux, le sifflement du rossignol, ni même le cri du corbeau qui lui faisait si peur quand il était enfant.
Plus jamais, il n’entendra le bruit de l’eau. Le bruit de l’eau se fracassant au pied des cascades, le clapotis du torrent, le flux et le reflux des vagues sur la plage, l’été, pendant ses vacances en Bretagne.
Plus jamais, il n’entendra la symphonie du vent, la mélodie des feuilles de tremble quand la bise les faisait danser.

Plus jamais, il n’entendra les chants des enfants qui jouaient dans sa rue.
Ni même Madame Michaud. Elle râlait toute la journée mais il aurait aimé l’entendre encore râler Madame Michaud. Il l’aimait bien quand même Madame Michaud…

Une larme commence à couler sur sa joue.
Plus jamais, il ne la reverra la Terre…
SA TERRE !

Il se relève pour regarder la Terre une dernière fois…
Comme s’il pouvait la revoir une dernière fois.

Et…
Elle est là !
La Terre est toujours là !
Il la regarde.
Il ne peut pas la quitter des yeux.
Elle l’hypnotise !

– Eh, L’Homme !

C’est le Dieu Président de l’Assemblée des Dieux.
Mais L’Homme ne l’entend pas.
Il regarde la Terre.
SA TERRE !
Elle est là !
Il sanglote. Il pleure de joie.
Il a envie de l’embrasser, de l’enlacer…
De la protéger comme quelqu’un qu’on Aime.

IL L’AIME !
MAINTENANT, IL LE SAIT.

– Eh ! L’Homme !
Ce que tu viens de voir, c’est ce qui pourrait arriver si les Humains devenaient des Dieux sans avoir trouver la Sagesse !
Nous, l’Assemblée des Dieux, avons décidé de vous donner une autre chance.
Nous savons que vous n’êtes pas mauvais, que vous êtes seulement ignorants.
Nous allons vous accorder une seconde chance.
Plutôt que de vous donner 86400 Talents tous les matins, nous allons vous les offrir un par un.
De l’instant de sa naissance jusqu’au moment de sa mort, chaque Humain recevra des Talents. Mais cette fois, il les recevra les uns après les autres.
Mais ATTENTION, dès que vous utiliserez un Talent, le précédent disparaîtra, quoi que vous en ayez fait !
Et pour vous souvenir que c’est votre seconde chance pour trouver la Sagesse, vous appellerez chaque Talent : LA SECONDE !
Pour ne pas oublier que ce Talent, cette Seconde est un cadeau de l’Assemblée des Dieux pour vous permettre de trouver la Sagesse, chaque Seconde, au moment où vous l’utiliserez, vous l’appellerez : LE PRÉSENT !

Et c’est depuis ce jour que chaque Humain, de l’instant de sa naissance à celui de sa mort, possède tous les Talents nécessaires pour trouver la Sagesse et siéger à l’Assemblée des Dieux.

Depuis ce jour, L’Homme parcourt la Terre pour raconter son histoire à ceux qu’il rencontre.

Avant de partir, le vieil homme, L’Homme me dit :

– Quand tu rencontreras des Humains, raconte-leur mon histoire. Peut-être qu’ils comprendront…
Dis-leur bien que ce Talent, la Seconde, le Présent offert par les Dieux pour nous permettre de trouver la Sagesse, c’est notre Seconde chance !

Ses yeux brillaient, une larme coulait sur sa joue.
Avant de me quitter, il ajouta :

N’OUBLIE PAS DE LEUR DIRE QUE
LA SECONDE…
CE CADEAU DES DIEUX
POUR NOUS PERMETTRE
DE TROUVER LA SAGESSE
LE PRESENT…
NOTRE SECONDE CHANCE…
N’OUBLIE SURTOUT PAS DE LEUR DIRE QUE

C’EST PEUT-ETRE LA DERNIERE !

(86400 correspond au nombre de secondes par 24 heures.)

L'Orchidée blanche et le Papillon

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Une fleur vit dans les montagnes, dans une jolie petite vallée au pied d’un glacier. La langue du glacier lèche quelques rochers entre lesquels on peut percevoir des îlots colorés de bleu par les quelques pensées, gentianes et soldanelles qui ont su trouver un petit coin de paradis où semer leurs progénitures. Quelques joubarbes se dressent fièrement de leurs artichauts pour montrer à tout leur voisinage qu’elles sont très heureuses où elles se trouvent et qu’elles ont bien l’intention d’y rester.

Un petit torrent émerge sous la langue du glacier, contourne les obstacles, offrant son frais et doux breuvage à tous ceux qui le désirent. L’herbe de la prairie est d’un vert que seuls les grands peintres peuvent reproduire. Le bleu du lac est d’un bleu si bleu que le ciel s’y mire pour que toute la vallée profite de sa splendeur.

La couleur des fleurs est d’une telle pureté que les rouges, les bleus, les jaunes, les blancs se mélangent dans un tourbillon multicolore, comme une fête qui ne veut jamais finir. A l’automne, la forêt revêt sa plus belle robe. Toutes les feuilles empruntent des pourpres, des ocres, des rouges, des jaunes… des flammes de couleurs montent dans le ciel, jusqu’aux plus hautes cimes des arbres rendant aux montagnes leur plus majestueuse beauté.

Et le soleil est si heureux de voir toute cette nature si belle qu’il la remercie en arrosant toute la vallée de ses rayons pour donner encore plus de joie à cette fête…

Ni les insectes, ni les oiseaux qui la survolent n’ont jamais rencontré un paysage aussi beau. Même les hirondelles, qui parcourent des milliers de kilomètres durant leurs voyages, n’ont jamais vu une pareille beauté.

Cette fleur est une orchidée.
Une orchidée… la fleur la plus sophistiquée, la plus subtile, la plus belle, la plus fragile, peut-être la plus sensible.
Une orchidée… une des plus anciennes fleurs de la planète Terre. Une fleur capable de choisir qui va la féconder, capable de prendre l’odeur, la forme, la couleur qu’elle veut pour attirer celui qu’elle a choisi. Capable de se donner l’apparence d’un insecte femelle pour que le mâle de la même espèce vienne la butiner, prendre son pollen et le déposer sur le pistil d’une autre orchidée pour la féconder.
Une orchidée… la fleur qui a trouvé comment se reproduire en ne laissant rien au hasard.

Cette orchidée est blanche.
C’est la plus jolie fleur de toute la vallée. D’une blancheur comme personne n’en a jamais vue auparavant. D’une blancheur qui laisse une empreinte au fond du regard, une trace dans la mémoire de tous ceux qui l’admirent, dès le premier coup d’œil. Une blancheur comme seule la pureté peut en connaître, la pureté du voile des anges, la pureté de la neige vierge, de la virginité.

Si la perfection existait, elle serait certainement une orchidée blanche.

Un papillon vient la butiner.
Elle a tout fait, sans le savoir, pour que ce soit ce papillon précisément. Elle ne l’a pas choisi lui spécialement, mais tout la dirige vers cette rencontre.
Leurs destins sont liés. Ils ne le savent pas encore.

Il l’embrasse, la caresse de sa trompe, fouille tout au fond de sa corolle pour aller chercher le suc, ce délicieux nectar qu’il adore et qui le nourrit.
Elle aime les caresses de ce papillon, sa douceur, le respect qu’il a pour elle. Elle aime cette façon qu’il a d’aspirer le suc sans jamais la blesser, comme un baiser, un tendre baiser, qui la fait frissonner parfois. Il ne lui prend que le nécessaire, attentionné à ne pas ponctionner plus qu’il n’en a besoin, plus qu’elle accepte de lui en donner. Il la respecte…

Mais ce papillon a un “ je ne sais quoi ” qui rappelle quelque chose à l’orchidée blanche.

Une odeur !
Cette odeur, n’est-ce pas la même que celle de cette immonde chenille qui venait régulièrement, depuis son plus jeune âge, lui grimper dessus, escalader ses tiges, grignoter ses feuilles, sans jamais lui demander son avis ?

Non, ce n’est pas la même odeur.
Mais elle lui rappelle cette chenille qui n’a pourtant rien à voir avec ce papillon.

L’orchidée n’avait que quelques jours quand cette horrible chenille a commencé son travail de sape. Depuis qu’elle était tout bébé, qu’elle n’avait encore que quelques toutes petites feuilles, elle l’a sentie grimper sur sa tige, ses griffes pénétrer sa chair, la blesser, grignoter ses petites feuilles à peine sorties, encore vierges.

Elle sent son odeur. Cette odeur qui, depuis des années, ne l’a jamais quittée.
Elle ne risque pas de l’oublier, cette odeur !

Beaucoup d’insectes sont déjà venus la butiner depuis, parfois violemment, parfois avec douceur. Avec tendresse au début pour certains, mais souvent, après quelque temps, ils ne lui demandaient plus son avis. Ils forçaient le passage quand elle ne voulait pas, ne voulait plus, quand elle était fatiguée de ces suçons.
Elle avait beau s’efforcer à obstruer l’entrée, conservant précieusement parfois une goutte de rosée pour qu’ils ne puissent absorber son breuvage, ils allaient jusqu’à boire cette goutte, même s’ils n’avaient pas soif, juste pour lui voler ce nectar qui les enivrait. Ils ne lui demandaient plus son avis, ne s’occupaient pas si, elle, cette jolie orchidée blanche, désirait leur offrir un peu d’elle.

Et elle ne pouvait rien faire contre eux. Ils ne s’intéressaient qu’à leurs propres plaisirs. Ils ne la regardaient même plus. N’importe quelle fleur aurait fait leur affaire, car ce qu’ils désiraient, c’était butiner, seulement butiner !
Ils ne la violaient pas vraiment, mais elle était soumise. Elle les laissait faire car ils savaient lui donner du plaisir quand même. Etre butinée, c’est une sensation de plaisir, de jouissance que seules les fleurs peuvent connaître.

Plusieurs insectes ont effleuré sa corolle.
Elle se souvient de Bernard, le bourdon. Gentil… pas très malin, mais gentil. Mais surtout, il manquait de douceur. Il était même grossier et brutal parfois…
Et Jean, la guêpe ! Il butinait bien mais… il butinait toutes les fleurs qu’il rencontrait alors…
Il y avait aussi eu Georges, l’abeille. Lui était vraiment sympa. Elle était bien avec lui, mais depuis leur première rencontre, il la butinait tous les jours, plusieurs fois par jour même. Elle aimait bien ça au début, mais plusieurs fois par jours… et tous les jours, sans jamais une journée de repos… sans lui demander ce qu’elle voulait, ni même si elle voulait… Et lui, que pouvait-il bien lui apporter ? Elle s’était lassée de lui au bout de quelque temps.
Et puis Phénix, le papillon de nuit… Elle ne le voyait presque jamais. Il était toujours parti avec ses copains, celui-là ! Quand il venait la voir, il ne s’occupait pas d’elle. Enfin si… Il la butinait… rapidement. Et il repartait sans jamais rien lui dire, jamais rien d’important. Elle ne savait rien sur lui. Il ne sortait que la nuit. Mais elle, la nuit, elle dormait ! Il la réveillait seulement pour la butiner et disparaissait. Et puis, après une de ces nuits, il avait disparu encore une fois et… n’était jamais revenu…
Et il y eut Pierre… et Jacques… et Maurice… et beaucoup d’autres… et… et ce papillon !

Un papillon ordinaire, un papillon pas plus beau qu’un autre. Mais elle l’aime bien, ce papillon. Il a quelque chose de différent…

Mais elle ne peut oublier que ce papillon, il y a bien longtemps, a certainement été une chenille. Une de ces affreuses chenilles, comme celle qui la grignotait, lui arrachait un peu d’elle, morceau par morceau, en découpant méticuleusement sa tige et ses feuilles. En la dévorant, en se nourrissant de sa chair, elle la tuait à petit feu, lui volait son âme. Elle la faisait mourir tout doucement.

L’orchidée a réussi à survivre. A force de regarder le soleil, de profiter de ce que la Terre, sa mère nourricière, lui offre, elle est devenue forte, plus forte que la chenille et a réussi à la repousser loin d’elle.
Et elle est devenue belle, forte, fière, et tout son entourage profite de sa beauté.
Toute la vallée connait son histoire.
On la cite en exemple.
Elle apporte de l’espoir aux autres fleurs, leur donne le courage de se battre, de lutter contre ces prédateurs qui ne s’attaquent qu’aux faibles, les empêchant de pousser, d’éclore, de devenir ce pourquoi elles ont été créées, de superbes fleurs pour montrer à tous que le monde est beau.

Le papillon, lui aussi, est né pour montrer la beauté de la nature.

Elle admire la grâce de son vol, de ses ballets juste avant la tombée de la nuit, quand le bleu de ses ailes dessinent des “ Je vous aime ! ” dans le rose orangé du ciel peint par les rayons du soleil.
Et quand il atterrit sur un de ses pétales, elle le sent à peine. Il se pose avec une délicatesse… comme une caresse, et un doux frisson la pénètre.
Jamais il ne vient sans avoir été invité. Parfois il ne la butine même pas, il reste simplement là, à la contempler, à l’admirer. Il lui arrive même de déposer une goutte d’eau juste au rebord de sa robe blanche pour la rafraîchir quand le soleil, haut dans le ciel, la chauffe un peu trop.
Jamais aucun des insectes qu’elle a rencontrés ne s’est préoccupé de son bien-être comme lui, ne l’a regardée comme il la regarde, ne l’a sans doute aimée comme lui, il l’aime.
Jamais personne ne l’avait rendue heureuse, sereine comme elle l’est quand il est avec elle…

Pourtant elle n’est pas vraiment heureuse.
Quelque chose la dérange, l’empêche d’atteindre ce bonheur sans faille auquel elle aspire.

Il y a toujours le souvenir de cette odeur.
Ce n’est pas l’odeur du papillon, mais dès qu’il est présent, ce souvenir l’envahit, la rend triste. Elle ne peut profiter de sa compagnie pleinement car l’odeur de ce souvenir, le souvenir de cette odeur emplit tout l’espace.
Le souvenir, l’odeur, le passé sont plus présents que le présent. Et ils l’empêchent d’être heureuse. Parfois même, ils lui font peur. L’odeur lui fait peur.
Leurs passés sont liés.

Ce papillon peut-il avoir été une de ces chenilles ?
Comment une larve ne sachant que ramper peut-elle s’être transformée en une créature capable de voler si haut, de se rapprocher si près des anges ?
Comment une chenille aussi laide, aussi méchante peut-elle être devenue ce prince qui la séduit et qu’elle aime ? Qu’elle aime car il lui donne tout ce qu’elle désire et ne prend que ce qui lui est nécessaire, que ce qu’elle veut bien lui offrir… jamais plus.

Quand elle lui montre par un frémissement qu’elle n’est pas prête à être butinée, il reste à ses côtés, déploit ses ailes comme un éventail, les secoue doucement de haut en bas et une douce bise la caresse. Sans qu’il ne la touche, elle sent cette caresse jusqu’au bout de ses racines, jusqu’à ses plus petites radicelles.

Est-ce possible ? Peut-on changer à ce point ?
Que reste-t-il de la chenille dans ce papillon ?
Et les papillons, ne se re-transforment-ils pas en chenilles ?
Ne peut-il pas lui aussi, plus tard, redevenir cette chenille, la faire souffrir ?
L’amour n’est-il pas lui-même une autre forme de souffrance, plus subtile mais plus profonde ?
Pourra-t-elle aimer un jour sans souffrir ?
Mérite-t-elle tout l’amour qu’il lui offre ?

Trop de questions hantent son esprit de fleur !

Et le papillon aime l’orchidée blanche.
La toute première fois qu’il a franchi le col, il n’en a pas cru ses yeux. Jamais il n’a vu un tel paysage.

Quelques heures plus tôt, il était encore là-bas, de l’autre côté, tout en bas, à coté d’une de ces flaques, avec ses congénères, les autres papillons bleus.
Au col, il s’est posé sur un rocher pour se reposer. Jamais il n’a été si loin, jamais volé aussi longtemps.

Qu’a-t-il fait de sa vie jusqu’à aujourd’hui ?
Depuis qu’il est sorti de son cocon, il n’a pas fait grand-chose. Avec toute la bande, il passe toutes ses journées à déambuler de flaque en flaque, à se saouler avec de la mauvaise eau boueuse fermentée et à jouer. Que peut-il attendre de sa vie, là-bas ? Boire et faire la fête ?
Depuis plusieurs jours, son regard est attiré par ce col. Il y a quelque chose derrière, quelque chose qui va changer sa vie !
Quelque chose ou quelqu’un !
Il le sent. Il le sait.
Une sorte de voix intérieure, un instinct lui dicte de s’y rendre.
Il écoute cet instinct… Il quitte ses amis, prend son envol et arrive sur ce col.

Son regard est immédiatement attiré par ce petit point blanc, brillant au milieu de la prairie. Un blanc comme il n’en a jamais vu auparavant. Cette fleur, car c’en est une, il en est sûr, semble réfléchir toute la lumière du ciel, du soleil.
Il descend prudemment, en tourbillonnant. En se posant doucement sur un pétale avancé, élancé comme une piste d’atterrissage, sa douceur le surprend… Du coton, du velours ou peut-être de la soie, se dit-il tout d’abord …

Mais non, il vient de se poser sur la plus belle fleur que la nature n’a jamais créée, de rencontrer pour la première fois l’orchidée blanche. La douceur de ce pétale dégage toute sa sensibilité, toute sa sensualité, toute sa vulnérabilité, toute sa fragilité.
Il ne veut pas enfoncer sa trompe dans ce calice dès son atterrissage comme il le ferait avec une autre fleur. Il ne veut pas la brusquer. Cette orchidée, elle a besoin de tendresse, d’attention, de compréhension, d’amour… il le sent.
S’il pouvait, il l’enlacerait de ses ailes… mais ses ailes ne sont pas assez grandes.

Il a rencontré beaucoup de fleurs quand il était là-bas, de l’autre coté du col. Il en a goûté, humé de nombreuses, de la vulgaire pâquerette sans odeur particulière à la très jolie mais un peu trop capricieuse ancolie, à l’arôme envoûtant.
L’orchidée dégage un doux parfum sucré, légèrement musqué. Ce parfum, chargé de sensibilité, de tendresse, de délicatesse, de bonheur inonde toute la vallée.

Elle a cette générosité rare de ceux qui savent vraiment aimer.

Il ressent cet amour dans tout son être, jusqu’au plus profond de son âme. Mais il sent aussi que quelque chose la perturbe. Une pointe d’acidité s’immisce et vient contrarier cet arôme.
Il perçoit comme de la peur, de l’angoisse, de l’anxiété.
Il l’aime. Et elle aussi l’aime, il n’en a aucun doute. Elle lui offre tout ce qu’il a toujours désiré et lui rend du mieux qu’il peut mais…

Ceux qui s’aiment n’ont pas besoin de se parler pour se comprendre. Le papillon comprend la fleur quand revient à lui cette pensée de ce qu’il a été autrefois, avant la grande transformation, la grande métamorphose.

Il vient d’avoir la même pensée que l’orchidée.
L’amour a ce pouvoir ! La transmission de pensée…
C’est peut-être ça le miracle de l’amour, avoir la même pensée au même moment ?

Il vient de se revoir chenille, découpant, grignotant, dévorant une feuille.
Il ressent ce qu’a du éprouver son amie quand une autre chenille s’en prenait à son propre corps, la violait, lui arrachait un peu d’elle. Il prend conscience de la douleur qu’elle a pu ressentir quand cette chenille la mutilait.
Il sent l’odeur de cette chenille !
Cette odeur l’imprègne, lui colle à la peau, le submerge. Cette odeur répugnante l’écœure. Il commence à se dégoûter, à se détester, à se haïr même. Il a envie de fuir, de disparaître, de mourir sur le champ.

Pourra-t-elle lui pardonner d’avoir été une chenille ?
Est-il redevenu cette chenille ?
A-t-il le droit d’aimer cette belle orchidée ?

Peut-elle encore l’aimer ?
Pourquoi s’aiment-ils ?
Pourquoi se sont-ils rencontrés ?
Est-ce leurs passés qui les a réunis et qui aujourd’hui les séparent ?
Pourquoi ?

Tant de questions… Trop de questions..
Il se rappelle la métamorphose, quand tout a changé.
Il ressent, comme s’il y était encore, le moment où de son corps est sorti ce filament qui l’a emprisonné.
Il se souvient de l’angoisse, de la peur de cette transformation.
La panique de mourir quand il n’arrivait plus à respirer l’oppresse de nouveau.
La crainte d’un avenir qu’il ne connaissait pas.
Qu’allait-il devenir ? Pire ? Meilleur ?
Il ressent la douleur de son corps, de son âme.
L’affolement quand il a senti sa peau se déchirer…
La souffrance quand ses ailes se sont arrachées de son corps…

Et après de longs jours de souffrances, de doutes, d’espoirs, il est ressorti papillon.
Et ce qu’il est devenu, il l’aime bien.
Il s’aime en papillon.
Ses pensées ont changé.
Il n’est plus là pour détruire, il est maintenant là pour aider, pour aimer et montrer que le monde est beau.

Quand il était chenille, il (ou plutôt elle) tuait à petit feu la fleur qui la nourrissait. Elle ne le faisait pas volontairement. Elle prenait mais n’offrait rien en échange…
Et le papillon qu’il est devenu aide la fleur, parfois la même fleur, à s’épanouir, à se reproduire, tout en se nourrissant.
Et il est libre. Il peut voler.
Les papillons existent peut-être pour
montrer que le changement,
le vrai changement,
celui de l’âme,
est possible ?

La chrysalide, ce passage nécessaire de la chenille au papillon, a été si douloureux.
Il a réussi !

Mais la chenille est-elle toujours là, quelque part ?
Il a envie de hurler de douleur. Ce n’est plus une douleur physique, mais c’est pire encore, c’est une douleur de l’âme. Avoir vécu toutes ces souffrances, cette mort et cette renaissance… Et être là, souffrir à nouveau, parce que, dans une vie antérieure, il a été chenille. Une chenille qui a certainement fait souffrir une fleur, autrefois.
Ce n’est pas juste !

Mais il comprend l’orchidée, sa bien-aimée, son amie. Comment peut-elle lui pardonner ? Comment peut-elle accepter d’être butinée par un papillon qui lui rappelle en permanence son passé, cette chenille ?
Si cette odeur lui revient en mémoire en sa présence, elle ne pourra jamais être heureuse avec lui.
Cette odeur pourra-t-elle la quitter un jour ?

Ce qu’il désire le plus, c’est qu’elle soit heureuse.
Ce qu’elle désire, c’est d’être heureuse.
Avec lui, elle trouve tout ce qu’une relation peut lui apporter et elle lui offre tout ce qu’il espère y trouver.
Et lui ne peut pas, ne peut plus la rendre heureuse, être heureux avec elle !
Et elle ne peut pas, ne peut plus le rendre heureux, être heureuse avec lui !
Leurs passés les ont rattrapés.
Tant que ce passé sera présent, ils ne pourront connaître le bonheur ensemble.

L’orchidée aime le papillon…
Et, à cet instant, elle l’aime comme elle n’a jamais osé aimer.

Elle crée un nouveau nectar. Elle invente un nouveau goût, une saveur d’une telle sensibilité que la nature ne l’a même pas encore imaginée, un nouveau parfum, le parfum de l’amour, d’un arôme plein de tendresse…
Elle s’ouvre entièrement à lui, lui offre ce qu’elle a de plus beau, ce qu’elle vient de devenir, non seulement la fleur la plus jolie, mais la fleur la plus belle.

Elle voit le papillon avec un nouveau regard.
L’odeur de la chenille a disparu !

Le papillon accepte son offrande. Il butine ce nectar.
“ Du miel ! ”
C’est la première pensée qu’il a en pénétrant de sa trompe ce calice merveilleux, éclairé d’une lumière qu’il n’a encore jamais rencontrée. Ce parfum lui rappelle le miel. Cette odeur, il l’a déjà sentie en passant tout près du village des abeilles, de l’autre coté du col.

Dès qu’il effleure le suc, il sent son corps vibrer.

Une sensation, comme un doux fourmillement, le parcourt jusqu’au bout des antennes.
Il se transforme, se métamorphose, s’embellit devant les yeux émerveillés de la belle orchidée.

Le bleu des ailes de ce petit papillon bleu, semblable au bleu des ailes de tous les autres petits papillons bleus des flaques, ce bleu délavé semble reprendre des couleurs, se mettre à briller, et devient un bleu presque nuit. Il ne lui manque que les étoiles pour briller.

Ces deux ailes s’allongent, s’étirent pour devenir… quatre ailes ! Deux ailes devant, deux ailes derrière.
Des canaux d’or et de rouge se dessinent de part en part enfermant le bleu, formant de petits lacs. Les ailes arrière s’élancent très loin, se terminent par de petites plumes… une traîne de plumes.

Même son corps est devenu fort. Des rangées de fils de soie forment un escalier semblant se diriger jusqu’à son cœur sur un corps ferme. Deux duvets colorés lui couvrent la tête.
Et ses antennes ! Les deux petites brindilles se transforment en deux splendides plumes se relevant fièrement.

Quand le papillon prend son envol, deux grands yeux la fixent. Sur les ailes, ils sont apparus. Un regard comme elle n’en a jamais reçu. Ces yeux noisette lui sourient, mais d’un sourire qui vous ouvre l’âme.

Tout au fond de ces yeux, elle plonge dans un bain d’amour.
Un amour qu’elle mérite tellement elle lui en donne.
Elle ne peut quitter ce regard.
Elle baigne dans une plénitude, une émotion qu’elle ne connaît pas encore.
Ce sourire est franc, sincère… heureux !

Et dans ce regard, elle reconnaît une part d’elle.
Elle voit son âme. Elle voit leurs deux âmes entrer en symbiose, n’en former qu’une… Une belle âme.

Elle comprend tout l’amour qu’elle offre à ce papillon, et tout l’amour que le papillon lui rend.
Toute la tendresse qu’elle reçoit n’a d’égal que celle qu’elle lui voue.
Ce que lui inspire ce sourire est au-delà des mots. Il est le reflet de leur union, de leur amitié, de leur complicité, de leur sincérité… de leur vérité !

La vérité ! Ils se sont dits toute la vérité !

Tout a changé !
Ils s’aiment d’un amour que personne n’a encore effleuré.

Certains s’aiment à en mourir…
Eux s’aiment à… en vivre !

Une pensée unique pour deux êtres qui s’aiment :

“ Je NOUS aime ! ”

Il s’élève, il monte, monte, monte toujours…
Elle le regarde s’éloigner…
Et, il disparaît dans la lueur du soleil.

La fleur vieillit et se retire à l’automne suivant.
Elle ne reverra jamais le papillon.

L’hiver passe, puis le printemps s’installe.

La vallée renaît doucement. Les arbres dressent leurs guirlandes de feuilles. Des verts des plus tendres aux plus foncés se mélangent. Les fleurs pointent leur nez timidement, donnant à la vallée un air de fête retrouvée.
Toute la nature se réveille, revit dans une palette de couleurs…

Et parmi toutes ces fleurs, des diamants viennent de sortir de terre, éblouissant toute la vallée.

DES ORCHIDÉES BLANCHES !

Des centaines de petites orchidées blanches se dressent parmi toutes les autres fleurs, rayonnent de leur beauté… de la vraie beauté.

Franchissant un col, un petit nuage approche.

Couvrant la vallée, des centaines de grands papillons bleus viennent de se poser sur des centaines d’orchidées blanches.

Mais où es-tu, Ange ?

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Ange ? ! … Ange ? ! …
Mais où es-tu, Ange ?

Tu as regardé la Terre de là-haut…
De chez toi,
Du Royaume des Anges.

Tu regardais la Terre,
Les habitants de la Terre.
Tu observais les gens.
Tu as vu comment les gens s’Aimaient.
Tu as trouvé qu’ils avaient une drôle de façon de s’Aimer.
Tu avais vraiment l’impression qu’ils n’avaient pas compris
Le vrai sens du mot Aimer.
Ils parlaient d’Amour…
Mais le mot Amour n’existe pas au Royaume des Anges…
On Aime…
Simplement !

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu as décidé d’aller sur la Terre.
De rencontrer ces gens.
De leur expliquer le vrai sens du mot… Aimer !
Mais comment rencontrer les gens sans leur faire peur ?

Il n’était pas question d’arriver et de leur dire :
– Je suis un Ange !
Les gens, sur Terre, ils ne croient pas aux Anges…
Surtout les grands !
Comment leur expliquer le vrai sens du mot Aimer
Sans leur faire peur…

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu as trouvé !
La seule façon de ne pas les heurter,
C’est de leur ressembler.

Et tu as trouvé !
Arriver en empruntant le corps d’un bébé.
Tu avais remarqué que les gens là-bas,
Même les grands
Ils aimaient les enfants naissants !
C’était peut-être les seuls êtres qu’ils savaient vraiment Aimer, d’ailleurs !

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu es arrivé…
Tu avais choisi une jolie petite fille.
De mémoire d’Anges,
On n’avait jamais vu un bébé donner autant envie de l’Aimer !

Bien sûr, tu avais crié, pleuré quand tu es arrivé.
Arriver sur la Terre, parmi les Hommes,
Même pour un Ange, c’est douloureux !
Mais dès que tu as compris où tu étais,
Tu as cessé de pleurer.

De mémoire de parents,
Jamais on n’avait vu des parents Aimer autant leur enfant !
D’ailleurs quand on te regardait,
On ne pouvait que t’Aimer !
Tu étais le mot Aimer personnifié…

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu as grandi !
Tous ceux qui te voyaient ne pouvaient résister.
Dès qu’ils croisaient ton regard,
Ils t’Aimaient !

Tu t’es dit que tu t’étais peut-être trompé.
Les gens, sur Terre, ils savaient Aimer…

Tu étais un Ange !
Toi, tu le savais…
Mais eux, ils l’ignoraient !
Et pourtant…
Ils t’Aimaient !

C’était ça que tu voulais leur enseigner.
C’était exactement ça, pour toi, Aimer !
Tu t’es dit que tu n’avais pas regardé du bon coté,
Les gens ici, surtout tes parents…
Ils savaient Aimer !
Ils connaissaient le vrai sens du mot Aimer !

Mais tu étais un Ange…
Même s’ils l’ignoraient…
Un Ange, on ne peut que l’Aimer !
Parce qu’un Ange,
Il Aime… Simplement !

On ne peut que Aimer
Quelqu’un qui Aime
Comme Aime un Ange !

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu as grandi !
A huit ans, tu étais une si jolie petite fille…
Que tes parents étaient fiers de toi !

– Vous avez vu ma fille ?
Elle est belle ma fille, n’est-ce pas ?
Si douce, si gentille,
Si sensible !

Eh oui, Ange
Etre sensible à huit ans…
C’est si mignon, si charmant !

– Elle est si sensible !
On dirait un Ange !
Ah ! Si elle savait !

Mais où es-tu, Ange ?

Tes parents ne cessaient de te dire qu’ils t’Aimaient.
Et c’est vrai qu’ils t’Aimaient tellement…
Mais, ils avaient si peur.
Tu étais si sensible !

Tu t’émerveillais à chaque découverte.
Tu découvrais la vie d’humain…
Et qu’est-ce qu’elle était belle, cette vie !

Tu t’émerveillais pour de toutes petites choses,
De toutes petites choses… pour les autres.

Mais si grandes pour toi !
La danse de milliers de petites lumières dans l’eau du torrent…
Le ballet des papillons dès le début du printemps…

Tu Aimais !
Tout ce que tu voyais, tu l’Aimais !

Tu voyais la beauté dans les étoiles…
Dans les nuages dans le ciel
Mais aussi dans les ciels sans nuages…

TU SAVAIS AIMER !

Pourtant tu commençais à oublier.
Pas oublier comment Aimer !
Mais oublier d’où tu venais…

Tu sentais bien qu’il y avait quelque chose !
Comme quelque chose qui t’échappait…
Quelque chose d’important !
Quelque chose que tu savais avant !
Quelque chose que, eux, ils ignoraient…
Même tes parents…
Quelque chose d’important !

Tu étais là pour ça !
Mais quoi ?
Tu savais au fond de toi…
Mais quoi ?
Il y avait quelque chose que tu ne comprenais pas !

Mais où es-tu, Ange ?

Tu t’émerveillais pour toutes ces belles choses que tu voyais.
Mais tu étais si triste pour de toutes petites choses.
Si petites pour eux…
Mais si importantes pour toi…

Tu ne comprenais pas…
Tu ne savais pas qu’on pouvait avoir autant de peine.
On ne te l’avait pas dit…
Peut-être avais-tu oublié ?
Il y avait tellement de choses que tu avais oubliées…

Quand tu as vu cet enfant pleurer,
Toi aussi tu as pleuré…
Tellement pleuré.
Tu étais si sensible.
Personne ne pouvait te consoler !
Tu ne savais pas pourquoi il pleurait…
Mais tu partageais sa peine.
Etre sensible, c’est aussi partager,
Tout partager !
Les joies, les peines…

AIMER, C’EST AUSSI ÇA, AIMER…
TOUT PARTAGER.

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu as grandi !
Cet oiseau mort au bord du fossé…
On t’avait certainement dit, au Royaume des Anges
Que la mort existait !
Mais, ça aussi, tu avais dû l’oublier…

Ils t’ont dit :
– Ce n’est qu’un oiseau !
Tu ne vas quand même pas pleurer pour un oiseau mort !
Ne sois pas si sensible !

Eh Oui, Ange !
Etre sensible à douze ans…
A douze ans, on n’est plus un petit enfant…
On est presque grand !
A douze ans, ce n’est plus de la sensibilité…
C’EST DE LA SENSIBLERIE !

Pour eux, ce n’était qu’un oiseau…
Mais pour toi, c’était UN oiseau !
Et tu Aimais cet oiseau…
Comme tout ce qui existait
Cet oiseau, tu l’Aimais …

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu as grandi !
Par les journaux, la télé,
Tu découvrais ce monde.
Tu as appris ce qu’était la guerre,
La faim, la misère…
Tous ces gens, sur Terre,
Ils avaient si peur…

Pourquoi tant de violence ?
Pourquoi tant de haine ?
Tous disaient qu’ils voulaient être heureux
Mais ils avaient si peur…
Peur de ne pas être Aimé ?
Peur d’Aimer ?
Pourtant, c’est si simple d’Aimer…

Même la Terre, ils lui faisaient la guerre !
Tous disaient qu’ils l’Aimaient, cette Terre.
Qu’ils ne pouvaient vivre sans elle…
Et pourtant !
Ils lui faisaient si mal !
Ils la maltraitaient, ils l’humiliaient,
Ils la violentaient, ils la violaient !

Toi, tu l’entendais gémir, hurler…
Pourtant la Terre, elle, les Aimait tant !
Elle savait vraiment Aimer, elle…
Elle leur donnait tout ce qu’ils lui demandaient
Sans jamais rien leur réclamer…

Elle, elle savait vraiment Aimer…
Et ils étaient en train de la tuer !

Tu avais envie de leur dire d’arrêter,
De crier, de hurler…
Et tu as pleuré, tu as tellement pleuré.

– Je ne comprends pas !
Je ne les comprends pas !
Pourquoi ? Pourquoi ?
Mais pourquoi font-ils cela ?

Mais où es-tu, Ange ?

Pourtant, tu savais que tu étais là pour…
Mais impossible de te rappeler pourquoi !
Tu étais un Ange
Mais tu ne t’en souvenais pas.
Avais-tu raison d’Aimer comme ça ?
Ça te faisait si mal !

Tu t’es enfui, tu as couru.
Tu étais cette Terre qu’ils maltraitaient.
Longtemps tu as marché, pieds nus.
Tu avais envie de rentrer dans cette Terre,
De faire l’Amour avec…
De ne faire qu’un avec elle !

Comment leur expliquer ?
Comment leur dire que tu Aimais ?
Que simplement, tu Aimais…
La Terre, les oiseaux, les étoiles,
Le jour, la nuit, le soleil, la pluie…

EUX AUSSI…

Mais Aimer comme eux, les Hommes ?
Non ! Ce n’était pas ça pour toi, Aimer !

Tu n’en pouvais plus !
Déjà, tu avais envie de tout quitter,
De les abandonner…
C’en était trop !
Plus que tu ne pouvais en supporter !

MAIS TU LES AIMAIS…

Quand ils t’ont retrouvé
Ils t’ont dit qu’il fallait te soigner…
Mais te soigner de quoi ?
D’Aimer ?
De savoir vraiment Aimer ?
De cette sensibilité ?

A dix-huit ans, ce n’est plus de la sensibilité…
A dix-huit ans, C’EST UNE MALADIE !

Ils ont dit : “ Maniaco-dépressive ”…

Eh, oui ! Ange…
Il ne fait pas bon être si sensible à dix-huit ans !

Ces médecins, ces savants,
Ils savaient ce qui était bon pour toi !
Ils t’ont donné des médicaments.
Ils t’ont dit : “ Ne t’inquiète pas ! ”

Mais où es-tu, Ange ?

Quand ce garçon t’a dit : “ Je t’Aime ! ”
Il était si gentil, si charmant…
Toi aussi, tu l’Aimais tant.
Tu étais si Heureuse !
Enfin, tu avais trouvé quelqu’un…
Quelqu’un qui savait vraiment Aimer !

Tu partageais ce bonheur !

ETRE HEUREUSE…
CE N’ÉTAIT PEUT-ÊTRE QUE POUR ÇA
QUE TU ÉTAIS LÀ ?

Mais quand il t’a dit le mot Toujours…
Quand il t’a parlé d’Amour…
Quand il t’a dit : “ Je n’Aime que toi ! ”
Toi, tu n’Aimais pas QUE lui
Tu Aimais… Tout simplement !

Quand il t’a dit : “ Je t’Aime ! Je te veux ! ”…
Mais quand on Aime, on ne veut pas…
Il t’a dit : “ Je ne veux pas te perdre !
Je ne te veux que pour moi ! ”

Mais non, ce n’était pas encore ça, pour toi, Aimer !

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu t’es souvenu, tu t’es rappelé…
Tu savais pourquoi tu étais là
Mais aussi d’où tu venais !

A qui le dire ?

Tu es allé voir ton médecin…
Si quelqu’un pouvait te comprendre
Qui d’autre que ton médecin,
Ton psychiatre, ton confident ?
Tu lui avais déjà expliqué…
Tu lui avais déjà dit qu’Aimer
C’était simplement… Aimer !
Que tu ne comprenais pas le mot Amour…

Et lui te comprenait…
Du moins, c’est ce que tu croyais !
C’est ce qu’il te disait
Chaque fois que tu le voyais.

– Je suis un Ange !
Lui as-tu dit.
Je suis un Ange !
Je me souviens de tout,
Je suis là pour vous apprendre à Aimer.
Vous n’avez pas compris le vrai sens du mot Aimer !
Aimer, ce n’est pas vouloir recevoir…
Aimer, c’est donner !
Sans condition !
Ne rien attendre en retour !
Aimer, c’est partager…
Tout partager !
Aimer, ce n’est pas avoir peur…
Aimer, c’est avoir confiance… en la Vie !
Je suis un Ange !
Vous m’entendez ?
Je ne suis pas folle !
Je suis un Ange !
Le mot Amour n’existe pas au Royaume des Anges,
On Aime…
Simplement !
Vous voyez bien que je ne suis pas folle…
Je suis un Ange !
Croyez-moi !
Je suis venue sur terre pour
Vous apprendre à Aimer !

Il ne t’a pas cru…

Et tu t’es souvenu…
Ici, sur Terre…
Ils ne croient pas aux Anges…
Surtout les grands !
Et ils t’ont enfermé…

Tu aurais pu crier, hurler.
Tu aurais pu pleurer.
Mais tu as décidé de les Aimer,
De simplement les Aimer…

Mais où es-tu, Ange ?

Et tu as décidé de t’en aller…
De tout quitter !
Tous ceux que tu Aimais,
Tous ceux qui t’Aimaient…

– Je ne comprends plus rien !
Ils ne comprennent rien !
Aimer, est-ce si compliqué
Pour les Humains ?

Alors tu as décidé de tout plaquer !
Tu as quitté ce corps d’enfant
Ou de jeune femme
Je ne me souviens plus très bien…

Oh, non ! pas question d’abandonner !

Tu es parti !
Peut-être à la rencontre d’autres
Pour leur expliquer
Qu’Aimer, c’est
Aimer… tout simplement !

Et tu es parti !
Peut-être as-tu simplement rejoint les tiens
Au Royaume des Anges…

Ici, tu avais fait tout ce que tu pouvais
Tu leur avais montré le vrai sens d’Aimer…

MAIS POUR EUX,
SIMPLEMENT…
C’EST SI COMPLIQUÉ !

Mais où es-tu, Ange ?

Pourquoi faut-il que les histoires
Soient toujours conjuguées au passé ?
Surtout les histoires d’Amour
Comme on dit chez nous
Au passé compliqué…
Pardon !
Au passé composé…

CE TEMPS IMPARFAIT
LE PASSÉ… SIMPLE !

Mais écoute-moi, Ange !

Chez nous aussi…
Où que l’on soit sur cette Terre,
Où que l’on vive sur cette planète,
Dans toutes les langues,
Dans tous les dialectes,
Parfois, le mot Aimer
Se conjugue aussi au Présent…

CE TEMPS PARFAIT…
LE PRÉSENT… SIMPLE !

Mais…
Où que tu sois, Ange…
Merci !

Allez ! Ciao Ange
Et…
Bon voyage !